jeudi 19 décembre 2019

BOOSTER DE VIE


Une ville peut survivre aux horreurs et aux destructions d'une guerre. Elle peut surmonter une crise économique en réorientant ses choix et la destination de ses commerces. Elle a les moyens de redonner vie à des quartiers laissés à l'abandon et celui d'en créer de nouveaux pour répondre aux besoins d'une population croissante. Elle peut s'adapter à des vagues d'immigrations et intégrer ces nouveaux arrivants dans son propre mode de fonctionnement sans léser quiconque. Mais elle ne se relève pas d'avoir acté l'abandon de sa jeunesse. Fort heureusement nous avons la chance d'avoir à Beaucaire plusieurs structures qui apportent aide et soutien à de nombreux beaucairois. L'Espace de Vie Sociale Booster est la dernière née de ces charpentes sociales qui ouvrent à une population en demande les portes d'une vie meilleure.

Comme ses consoeurs, l'EVS les 4 A et CEFAE, Booster offre au public un éventail d'ateliers qui vont d'une aide aux devoirs à l'apprentissage du numérique en passant par un accompagnement socioprofessionnel et une aide à la création d'entreprise, sans oublier des ateliers d'alphabétisation pour les personnes d'origine étrangère. leurs ateliers se destinent à la jeunesse beaucairoise autant qu'aux seniors ou aux nombreux beaucairois en difficulté sociale. La formidable équipe qui a fondé Booster s'est fondée sur des années d'expérience au contact des jeunes et de leurs familles, leur amour de leur ville et leur volonté d'apporter des solutions aux problématiques de leurs concitoyens, d'être dans le concret. Le concret cela connaît bien Yoann Soum, Sofiane Carleta et Driss Himmes, trois beaucairois engagés dans le monde sportif (Futsal et Football) depuis de nombreuses années. Ils ont acquis au fil du temps les compétences pour encadrer et former les jeunes footballeurs, désormais ils accompagnent également les familles, les personnes en difficulté et les nouveaux arrivants. Ne pas rester spectateurs et agir, là résidera sans aucun doute le succès de leur beau projet !

Nombreux sont les beaucairois bénévoles qui apportent leur aide à l'animation des divers ateliers, et à voir leurs sourires épanouis on devine sans peine qu'ils en retirent de grandes satisfactions sur le plan personnel. Je garde en mémoire d'autres sourires, mais aussi des larmes, ceux des intervenants de la Maison du Vivre Ensemble Ferdinand Buisson dont la municipalité frontiste avait acté la chute en les virant purement et simplement de leurs locaux en janvier 2015. Un très mauvais souvenir que cette fermeture, qui me fait d'autant plus apprécier l'existence et l'engagement social de celles qui ont suivi et qui sont désormais bien ancrées dans la vie beaucairoise. Assister à l'inauguration de la petite dernière était un vraie joie, l'EVS Booster est plus que bienvenue dans le paysage social beaucairois.

En poussant les portes de l'EVS Booster tout beaucairois, quels que soient son âge et sa situation sociale, est assuré de trouver un accueil chaleureux, un bon café, une écoute attentive et de réelles compétences. Et dans notre société actuelle cela n'a pas de prix. Merci Booster !

Ateliers EVS Booster

  • Emploi : documentation, information et orientation, e-space numérique, chantiers d’insertion, commerce solidaire
  • Famille : assistance numérique aux démarches administratives, médiation pour tous, ateliers sociolinguistiques, lutte contre la radicalisation (notamment numérique)
  • Jeunesse : accompagnement à la scolarité, médiation à proximité des collège, création d’une maison des jeunes.

jeudi 12 décembre 2019

SAVOIR OU NE PAS SAVOIR


Mais qu'est-ce qui ne tourne pas rond dans notre monde ? On assiste depuis quelques années à une recrudescence d'actes violents, allant de l'agression au meurtre, en passant par des attentats qui n'émeuvent pas plus que cela l'opinion publique. Car c'est bien connu, juifs, arabes, noirs, asiatiques, homosexuels, transgenres (et j'en oublie !) si quelque chose leur arrive c'est que d'une manière ou d'une autre ils ou elles l'ont cherché. Pour les citoyens lambda qui cèdent à la haine et à leurs peurs, ces personnes que désigne leur vindicte au gré de l'actualité ou de leurs humeurs ne peuvent en aucun cas être totalement innocentes. Il y a forcément chez elles, chez eux, quelque chose qui justifie ce qu'ils subissent. Les idéologies qui sèment la haine fleurissent et s'épanouissent, et si peu est fait pour les stopper... Quand l'exemple ne vient pas du sommet, à quoi peut-on s'attendre ?

Face à cette haine et ces comportements nauséabonds qui se multiplient dans notre pays comme dans tant d'autres, nous, associations antiracistes, nous efforçons d'alerter nos concitoyens sur ces dérives insupportables qui gomment toutes les victoires du vivre ensemble et de l'égalité des dernières décennies. Sans grand succès. Ces derniers temps nous tirons la sonnette d'alarme quasiment chaque jour, et chaque fois nous savons que cela n'arrêtera pas l'horreur de cette pollution de notre société par la haine et la violence. Aujourd'hui les réseaux sociaux révèlent en direct et au grand jour tout ce dont l'humanité est capable. Il n'est plus possible en 2019 de se cacher, tout le monde fouille, tout le monde creuse, tout le monde filme et photographie ses semblables ! Tout est balancé sur le net à une allure à laquelle nous n'aurions jamais cru pouvoir prétendre quelques vingt années en arrière, le pire comme le meilleur. Et malheureusement c'est le pire que nous tentons d'enrayer. En vain.

Mais comment espérer que les français, pour ne parler que d'eux, se reprennent et retrouvent une conscience humaniste autant que citoyenne quand nos propres dirigeant sont incapables de leur donner l'exemple ? Je ne parle pas ici de corruption, d'affaires en tous genres ou de paradis fiscaux. Non. Je vous parle de probité morale, de valeurs citoyennes et républicaines, de respect et d'égalité pour tous. Ce qui signifie, entre autres choses, de nous épargner de pitoyables tentatives de manipulation sur Twitter pour sauver les meubles quand par exemple le Président de la République merde quelque part... Par sa faute ou celle de son entourage, peu importe, le fait est que certains actes sont irrattrapables. Comme le fait de donner une très longue interview à Valeurs Actuelles. Ou celui de poser tout sourire avec Elie Hatem lors de la soirée donnée à l'Elysée à l'occasion de la remise de la Légion d'Honneur à Jean-Paul Belmondo, Robert Hossein et Ralph Lauren. Si les photos avec le Président de la République sont en effet d'usage lors de ces soirées, on ne saurait trop suggérer à ce dernier de réfléchir un tantinet avant de se livrer à l'exercice. Car en l'occurrence il ne s'agit en rien d'un invité ordinaire ! Son pedigree donne envie de vomir bien plus que d'applaudir...

Elie Hatem est un avocat franco-libanais (il a notamment défendu le mercenaire Bob Denard) qui a été membre du comité directeur de l’Action française pendant plusieurs années. C'est un ardent défenseur des théories antisémites de Charles Maurras (1868-1952) et un admirateur de Pétain. C'est également un ami de Jean-Marie Le Pen, un proche de toute la nébuleuse familiale et de la plupart des figures historiques du Rassemblement National. Il a participé à plusieurs rassemblements organisés par les catholiques intégristes de Civitas, et il a des liens avérés avec Alain Soral, Hervé Ryssen, Yvan Benedetti et Jérôme Bourbon, tous quatre connus (et parfois condamnés) pour leurs propos négationnistes (voir notes). Elie Hatem fréquente donc assidûment la lie identitaire, et il ne rechigne pas à exposer et défendre les théories maurrassiennes lors de conférences organisées par ses amis de la fachosphère. Il suffit de taper le nom de ce personnage sulfureux sur un moteur de recherche pour avoir accès à son curriculum vitae. Facile me direz-vous ? Eh bien non ! Pour la Team Progressistes qui prétend sur son compte Twitter "soutenir l'action de ceux qui croient en la démocratie, aux libertés, en France et en Europe, contre les xénophobes et europhobes" en gros l'Elysée ne savait pas qui était Elie Hatem. Sans blagues ! Je vous laisse savourer leur argumentaire bidon digne de la maternelle...


Argumentaire auquel j'ai répondu. Parce qu'il importe que certaines choses soient dites clairement. A savoir que les curriculum vitae des invités de ce type de soirée, qu'elle ait lieu à l'Elysée ou dans un ministère (ou tout autre lieu de la fonction publique), sont soigneusement épluchés. Il faut se conformer à une procédure de recherche menée par les services compétents, lesquels n'auraient pas traité cela à la légère. Il y a donc un aval donné quelque part entre l'invitation et l'autorisation. On n'entre pas si facilement au Palais de l'Elysée, en principe. Mais il semble que se réclamer de l'extrême-droite garantit désormais un blanc seing à quiconque sait tirer les bonnes ficelles...


Les associations antiracistes ont appelé en 2017 à voter contre Marine Le Pen. Faire barrage à l'extrême-droite était tout ce qui nous importait, il ne fallait pas que l'histoire se répète et aucun de nous n'a failli à ce devoir républicain. Mais aujourd'hui nous avons la sensation d'avoir été floués. Il n'est pas certain que nous le referons. La République est sur la mauvaise pente, elle glisse, guettée par de nombreux ennemis impatients de danser sur sa tombe. Alors qui sauvera notre démocratie ? Qui portera haut nos valeurs républicaines ? J'ai beau chercher, je ne vois pas... Tomber de Charybde en Scylla ne sera jamais la solution. Et pendant ce temps-là l'extrême-droite se frotte les mains.

Notes
  • Alain Soral (FN > Egalité & Réconciliation) 25 condamnations pour antisémitisme, négationnisme et incitation à la haine raciale
  • Hervé Ryssen (FN > MNR > Unité Radicale) 10 condamnations pour antisémitisme, négationnisme, homophobie et menaces de mort
  • Yvan Benedetti (L'Oeuvre Française > Jeune Nation > PNF) 1 condamnation pour la non dissolution de l'Oeuvre Française
  • Jérôme Bourbon (FN > l'Oeuvre Française > directeur de Rivarol) 9 condamnations pour incitation à la haine raciale, antisémitisme et négationnisme 

dimanche 24 novembre 2019

POROSITÉ, ALLIANCE ET COMPROMISSIONS


De la porosité à l'alliance il n'y a qu'un pas ! Certains candidats Les Républicains aux municipales le franchissent aujourd'hui allègrement, en s'appliquant à normaliser l'extrême-droite pour servir leurs ambitions politiques. Il est probable que cela leur donne bonne conscience, car à moins d'être devenus idiots ils ne peuvent nier ce que représente le Rassemblement National. Ils choisissent donc de s'allier au pire de l'échiquier politique, tirant sans états d'âmes un trait sur les combats du passé pour enrayer la menace fasciste. Et faisant corps désormais avec cette menace.

Pour conserver son ancrage local la droite en perdition se délite ouvertement, et concrétise par ses prises de position une dangereuse porosité avec l'extrême-droite, faisant siennes les idées liberticides et antirépublicaines du Rassemblement National au risque de mettre notre nation en danger. Clairement, elle entend redresser la barre en s'acoquinant publiquement avec les voyous de la République qui fondent l'extrême-droite la plus radicale. Les ambitions municipales des uns serviront les intérêts territoriaux des autres, jusqu'à ce que l'on ne sache plus très bien qui est qui tant leur gémellité idéologique s'affirmera jour après jour. 

Car s'il est un constat que l'on peut faire, et qui est à la portée de tous ceux qui s'engagent dans la bataille des municipales, c'est qu'il n'y a plus guère de différences entre Les Républicains et le Rassemblement National. Il suffit de mettre certains sujets polémiques sur le tapis pour que les propos dérapent et que s'affichent franchement racisme ordinaire et volonté de mettre bas la laïcité au nom d'un roman national chrétien fantasmé. Et si vous fermez les yeux vous ne saurez plus qui s'est exprimé le plus odieusement des uns ou des autres... Incroyable ? Pas tant que cela. Les militants antiracistes dénoncent cette porosité depuis plusieurs années, cette alliance affichée n'est donc qu'une demi surprise. Si elle provoque un sursaut de dégoût et déçoit, elle était néanmoins attendue d'une échéance électorale à l'autre. 

On ne peut bien entendu faire de bilan sur la droite sans en faire de même pour la gauche. Mais quelle gauche ? Elle est tellement désunie et affairée à sauver les meubles qu'une partie de ses éléments ont foncé tête baissée dans le piège du populisme, de bonne foi et sans vouloir admettre les dérives qu'ils cautionnaient par leur engagement. L'espace politique et sociétal se retrouve ainsi encombré de personnes qui ont porté, et portent encore, des avancées sociales et républicaines au nom de l'égalité des droits, mais qui désormais hurlent avec les loups de cette extrême-droite honnie, aveuglés par la même haine du système et résolument accrochées aux œillères généreusement fournies par leurs leaders et autres maîtres à penser. Là aussi, tout comme à l'extrême-droite, la liberté d'expression n'est qu'illusion démagogique que l'on vous sert en hors d'oeuvre pour mieux vous faire avaler le plat de résistance qui n'était pas inscrit au menu lorsque vous vous êtes assis à la table. La tentation est si grande d'oppresser, de diriger, de trancher des têtes, de se noyer avec les autres en se persuadant que l'on ne risque rien... Trop peu nombreux sont ceux qui refusent de plonger et défendent farouchement leur libre arbitre quand tant d'autres prétendent garder le leur, convaincus par leurs propres mensonges. 

On remarquera d'ailleurs qu'à droite comme à gauche les mêmes arguments et les mêmes ressorts sont brandis pour vous faire taire si vous osez affirmer qu'ils sont dans l'erreur ou pointer du doigt leurs dérives. Coïncidence ? Non. Il n'y a pas de hasard. Quand vous allez trop loin, d'un côté comme de l'autre, vous dérapez forcément un jour ou l'autre, c'est inéluctable et l'histoire l'a maintes fois prouvé. Les meilleures intentions du monde ont accouché des pires dictatures, et selon que vous vous trouviez d'un côté ou de l'autre de la barrière, vous serez agresseur ou victime. Mais foin d'illusions ! Les agresseurs demeureront toujours ce qu'ils sont, et vous asseoir à leur table n'en fera pas moins de vous des victimes.

Quid de nos jolies villes de province dans cette configuration cauchemardesque ? Malgré les sursauts républicains des uns et des autres l'extrême-droite renforce son ancrage local, elle se donne les moyens de ses ambitions et continue d'avancer, inexorablement. Ne pensez pas que ce qui se passe ailleurs n'aura pas de répercussions dans nos villes. Dès lors que l'on normalise ce qui ne devrait jamais l'être, on ouvre la porte à toutes les compromissions. Comme en amour, le plus douloureux c'est la première fois, après çà passe tout seul et l'on atteint la jouissance... Les Républicains ont ouvert la voie, certes, mais nul doute que nous verrons d'autres partis ou mouvements pactiser avec le diable pour s'accrocher au pouvoir ou le reconquérir. Les compromissions des uns et des autres donnent déjà de sérieux coups de canif dans le contrat républicain ici ou là, et les municipales s'annoncent compliquées pour les électeurs qui ne sauront plus très bien pour qui voter. Quand vous défigurez le paysage politique c'est un risque à prendre.

Alors d'aucuns vous diront que ce n'est pas si grave, qu'il vaut mieux cela que des affrontements qu'ils considèrent comme une perte de temps (ils entendent par là une perte de voix) qu'au nom de la démocratie on doit laisser toute sa place au Rassemblement National et consorts. Je leur répondrais qu'au nom de la démocratie justement, on ne peut pas, on ne doit pas, accorder un droit d'existence et de parole à des partis notoirement antirépublicains. Quels qu'ils soient, et quelle que soit leur tendance politique. En France notre vieux système c'est un peu les écuries d'Augias, la bouse s'est étendue dans les moindres recoins du territoire, et pour le nettoyer il faudrait qu'y débordent tous nos grands fleuves. En priant pour que tous les antirépublicains soient ainsi emportés par les eaux. Les survivants, s'il y en a, pourraient ainsi redémarrer en partant de zéro et en portant la République à bout de bras. Pour l'heure c'est tout le contraire. Certains partis politiques ne se conduisent pas mieux que des proxénètes, la République est pour eux une pute de luxe sur le labeur de laquelle ils enrichissent leurs magots. Quand elle sera usée par les scandales, les compromissions, les détournements d'argent, les atteintes à la laïcité et les attentats perpétrés par ses propres enfants, ils la jetteront et en adouberont une autre, plus jeune et plus résistante. Avec laquelle ils pourront cette fois faire bombance sans craindre d'être remisés au placard.

Voilà très exactement où nous en sommes. Vous je ne sais pas, mais moi cela me donne la nausée.


Note
Cette configuration ne concerne pas Beaucaire

dimanche 10 novembre 2019

Poppy Day : La Mémoire Vive


La mémoire des hommes est ainsi faite qu'elle laisse s'échapper des souvenirs trop encombrants, trop lourds à porter, ou simplement trop douloureux à commémorer. On constate ainsi que celle des français devient incroyablement sélective dès lors qu'il s'agit de certains pans de notre histoire. Relégués quelque part au tréfonds de leur mémoire, ils ne voient pas l'utilité de les sauvegarder et plutôt que de les transmettre aux nouvelles générations pour leur en faire toucher l'importance, ils choisissent de s'en débarrasser. En France les commémorations du 11 novembre ne mobilisent pas grand-monde. Des anciens combattants français de la Grande Guerre recensés et enregistrés, il n'en reste plus un seul pour raviver notre intérêt défaillant. Bien sûr quelques-uns parmi nous se rendent aux commémorations officielles dans leurs villes et villages, d'autres regardent à la télévision le Président de la République fleurir la tombe du soldat inconnu sous l'Arc de Triomphe, mais pour la très grande majorité des français le 11 novembre est un jour férié qui ne se distingue en rien de tous les autres. Les nouvelles générations ne s'attardent pas sur cet épisode sanglant pourtant étudié en cours d'histoire, très peu abordent le sujet avec leurs parents qui ne sont d'ailleurs guère plus intéressés. Et c'est dommage. Notre histoire nous construit, elle fait de nous ce que nous sommes aujourd'hui et apporte de nombreuses réponses aux problématiques de notre société moderne si encline à s'indigner de tout et très souvent de rien. Remettre les faits en perspective par le biais de l'histoire permet pourtant de les recentrer sur ce qui importe : faire société et tirer du passé les leçons qui s'imposent.

Rencontrant un couple d'amis anglais dont le bateaux est amarré quai de l'écluse, à Beaucaire, depuis de nombreuses années, je remarquai pour la première fois que lui portait épinglé sur sa veste, côté cœur, une fleur de laine rouge. A y regarder de plus près je vis qu'il s'agissait d'un coquelicot, et ils m'expliquèrent sa signification. En Grande-Bretagne on ne se contente pas de commémorer le jour de l'armistice, un appel est lancé pour récolter des fonds destinés aux familles de tous les soldats et civils morts en servant leur pays pendant la Première Guerre Mondiale, mais aussi aux blessés qui en sont revenus. Et le temps écoulé n'y change rien, la solidarité continue et s'étend à tous ceux qui sont victimes des conflits qui ont suivi. Comme en France, certes, mais l'esprit est différent. Le port du coquelicot (poppy en anglais) trouve son origine dans un très beau poème rédigé par le lieutenant-colonel canadien John McCrae pour les funérailles d'un ami tombé à la terrible bataille d'Ypres, en Belgique. Or il se trouve que le coquelicot fleurissait sur le bord des tranchées et sur les tombes des soldats, un phénomène rapporté dès les guerres napoléoniennes. Si remuer la terre en la creusant accélère la levée des graines en dormance, nul doute que l'abondance du sang versé y contribue également. Fleur fragile et délicate mais néanmoins obstinée, le coquelicot s'ancre dans les sols de souffrance pour honorer la mémoire des soldats qui y reposent... Le port du coquelicot est chaque année un appel aux dons lancé par la Royal British Legion en Grande-Bretagne et dans les pays du Commonwealth, pour soutenir les familles des soldats morts ou blessés au combat. 

Mais il est pour les anglais bien plus que cela. Hommes et femmes portent le "poppy" au revers de leurs vestes avec fierté, reconnaissance et tristesse. Ils honorent tous ces hommes partis pour la Grande Guerre dont tant ne sont jamais revenus. Fierté pour leur courage, reconnaissance pour le don de leurs vies, tristesse quand ils évoquent toutes ces vies abîmées, brisées, et ces villages entiers demeurés sans hommes à la fin de la guerre. Ce couple d'amis était ce matin au marché, avec un autre couple anglais dont le bateau est également amarré depuis quelques mois dans le port de Beaucaire. Elle, ne pouvant les trouver en France, avait réalisé au crochet les poppies qu'ils arboraient tous les quatre. L'émotion faisait vibrer leurs voix tandis qu'ils me parlaient du Poppy's Appeal et de l'importance que revêt pour eux et leurs concitoyens cette période de commémoration qui s'étire chaque année de fin octobre au second dimanche de novembre. Des larmes ont brillé dans leurs yeux comme ils évoquaient tous ces morts dont quasiment chaque famille porte le souvenir... 

Et là je me suis interrogée : pourquoi les français sont-ils si peu intéressés par la commémoration de notre histoire commune ? En France aussi des hommes et des femmes sont morts pendant cette guerre, pour tant d'entre eux fauchés en pleine jeunesse. Si rares sont ceux qui ont regagné leurs domiciles sans en porter les blessures ou les stigmates, cela ne se peut, ne se doit pas oublier. A cet égard il convient de signaler le remarquable travail de recherche de Cyrille Vivarelli, archiviste de notre intercommunalité qui a redonné vie dans son ouvrage, "Ceux de Beaucaire, morts pour la France 1914-1918", aux 231 Beaucairois victimes de la Grande Guerre. D'autres certainement ont comme lui de par la France fait oeuvre de mémoire, laissant ainsi une trace de ces existences brisées pour les générations futures, on ne saurait trop les en remercier. Si l'emblème choisi par la Grande-Bretagne pour les honorer est le coquelicot, il existe en France le bleuet, cette fleur sauvage qui fleurit elle aussi sur les bords des tranchées et sur les tombes. En 1972 je venais d'arriver en France, en Normandie, je me souviens parfaitement combien j'étais intriguée de voir tous ces hommes qui portaient le bleuet avec fierté. J'avais interrogé mon oncle, ancien combattant de la guerre d'Indochine, sur son origine, son histoire, et je n'ai jamais oublié... Mais vous, depuis quand ne l'avez-vous pas revu dans vos villes et villages ? Qui porte encore le bleuet, symbole aujourd'hui des deux guerres qui ont détruit tant de vies ? A contrario du Poppy bien vivace qui rapportait par exemple 49,8 millions d'euros en 2013, le Bleuet n'en rapportait que 1,1 million la même année ! Ces chiffres le confirment, perpétuer la mémoire de celles et ceux qui ont donné leurs vies pour la France n'éveille pas l'intérêt des français. Le bleuet est hélas tombé en désuétude, pendant que la mémoire de leurs descendants sombrait dans l'oubli et l'indifférence.


"In Flanders Fields" - John McCrae
Texte original
In Flanders fields the poppies grow
Between the crosses row on row,
That mark our place ; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.

We are the dead. Short days ago
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved and were loved and now we lie
In Flanders fields.

Take up our quarrel with the foe:
To you from failing hands we throw
The torch; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields.

Traduction littérale
Dans les champs de Flandre, les coquelicots fleurissent
Entre les croix qui, une rangée après l'autre,
Marquent notre place ; et dans le ciel,
Les alouettes, chantant valeureusement encore, sillonnent,
À peine audibles parmi les canons qui tonnent.

Nous, les morts, il y a quelques jours encore,
Nous vivions, goûtions l'aurore, contemplions les couchers de soleil,
Nous aimions et étions aimés ; aujourd'hui, nous voici gisant
Dans les champs de Flandre.

Reprenez notre combat contre l'ennemi :
À vous, de nos mains tremblantes, nous tendons
le flambeau ; faites-le vôtre et portez-le bien haut.
Si vous nous laissez tomber, nous qui mourons,
Nous ne trouverons pas le repos, bien que les coquelicots fleurissent
Dans les champs de Flandre.

Merci à Kevin et Barbara Hancock, ainsi qu'à leurs amis "I love you my dear friends"

mardi 29 octobre 2019

ADN DU RN : CONSTAT



L'ADN du Rassemblement National n'a pas évolué d'un iota ! La stratégie de normalisation du parti menée par Marine Le Pen depuis son élection à la présidence en 2012 a sans aucun doute abusé une partie des français, encouragés dans leurs choix électoraux par une situation de crise qui génère des peurs sociales légitimes. La démission de nombreux politiques et l'avidité de certains médias qui cherchent à faire grimper l'audimat plutôt que de privilégier l'information y ont grandement contribué. Les sites de réinformation de la fachosphère ont fait leur job à grands renforts de fake news, de buzz fondés sur des intox et de communication identitaire assurée par des militants d'extrême-droite radicalisés qui se sont autoproclamés "journalistes" ou "lanceurs d'alerte". Et cela a fonctionné. 

Les polémistes ont envahi les tribunes médiatiques pendant que de pseudos spécialistes de pacotille appuyaient leurs discours racistes, discriminatoires et négationnistes par des analyses censées démontrer qu'ils détenaient LA vérité. Repris en boucle par une certaine presse qu'on ne prendra plus la peine de nommer, par une partie de la classe politique toutes tendances confondues, et par des mouvements tendancieux comme le Printemps Républicain dont on se demande encore comment quiconque de sensé peut leur accorder un peu de crédit. Ce mouvement a de la laïcité une vision curieusement très concordante avec l'extrême-droite, au point de partager le même hashtag #pasd'amalgames suite à l'attentat de Bayonne, et d'attiser les mêmes peurs dans l'affaire du voile qui alimente la polémique du moment initiée par Julien Odoul. Gauche, droite, extrême-droite ? En ce moment les murailles qui les séparent explosent. 

Je suis pour un juste équilibre politique dans lequel tous les courants de pensée peuvent s'exprimer dès lors qu'ils sont en accord avec les lois de la République. Ce qui n'est en rien le cas du Rassemblement National qui n'en respecte aucune dès lors que cela dessert ses intérêts. Preuve en est l'embauche de Damien Lefèvre/Rieu au poste d'assistant parlementaire du député européen du Rassemblement National Philippe Olivier, le monsieur stratégie du parti. Pendant que Nicolas Bay embauchait de son côté Bastien Rondeau-Frimas, militant identitaire pro-Trump, pour remplacer Guillaume Pradoura qui ne manquera à personne. Non pas que ces deux-là puissent manquer à qui que ce soit ! Penser que le Parlement Européen va ouvrir ses portes à des identitaires, dont l'un est sous le coup de deux condamnations (voir notes) donne envie de se taper la tête contre un mur tellement cela semble aberrant. Et cela nous confirme, s'il en était besoin, que l'ADN du Rassemblement National n'a pas changé et ne changera jamais. Ils ont beau fleurir la vitrine pour faire illusion, les racines sont pourries...

Une pensée pour ce cher Damien qui paie de sa personne en toute circonstance avec obstination et un brin d'obsession, toujours là pour booster la communication redondante du parti qu'il a rejoint avec le même enthousiasme rafraîchissant que ses congénères identitaires, emboîtant le pas à Philippe Vardon qui roule des mécaniques en s'imaginant que son passé de néo nazi est tombé dans les oubliettes. Mais rien, jamais, ne sera oublié de vos actions déshonorantes pour la République. Rien ne vous sera concédé ou pardonné. Et pour ce qui Damien Lefèvre/Rieu qui a sévi trop longtemps à Beaucaire, nous fondons sur les deux décisions de justice qui planent au-dessus de votre tête tous nos espoirs de vous voir payer un jour prochain vos choix racistes et discriminatoires assumés avec tant d'arrogance. C'est promis, je me fendrai même d'un panier d'oranges et d'une petite carte ce jour-là !

Notes
1- 07 décembre 2017
Damien Rieu est reconnu coupable de "provocation à la discrimination nationale, raciale, religieuse par paroles, écrits, images ou moyens de communication au public par voie électronique et de dégradations de biens d’autrui, commises en réunion". Il est condamné à :
- un an d’emprisonnement délictuel, assorti du sursis total et d'une mise à l’épreuve pendant 2 ans
- obligation de réparer les dommages causés
- cinq ans de privation de ses droits civiques, civils et de famille

2- 29 août 2019
Damien Rieu est reconnu coupable "d'exercice d’activités dans des conditions de nature à créer une confusion avec une fonction publique". Il est condamné à :
- six mois de prison ferme
- 2 000 euros d’amende
- cinq ans d’interdiction de ses droits civiques, civils et de famille





dimanche 27 octobre 2019

COMMUNAUTÉ VS COMMUNAUTARISME



J'entends et je lis de plus en plus fréquemment, ici et là, des sursauts d'indignation dès lors que l'on emploie le terme "communauté". Que cela vienne d'une droite désertée par l'esprit républicain qui en fait des caisses pour qu'on ne lui reproche pas de stigmatiser l'autre, ou que cela se produise au sein d'une certaine gauche qui elle, à force de forcer le trait républicain, obtient l'effet inverse et pave le chemin de l'anti républicanisme le plus crasse de ses trop bonnes intentions, le terme fait frémir d'angoisse les plus braves. Un subtil mélange d'ignorance couplée à la peur primale d'être à son tour montré du doigt qui fait sursauter le citoyen lambda... Mais qu'en est-il exactement du terme en question ?


Il me paraît aberrant d'avoir à rappeler que le terme "communauté" n'est ni un gros mot ni un adjectif qualificatif stigmatisant. Il s'agit là uniquement d'un mot qui désigne des personnes qui ont en commun des us et coutumes, une religion, une origine, une ville de naissance, un métier, la pratique d'un sport, un talent artistique, voire même des pratiques sexuelles. Pas un gros mot donc, uniquement un mot qui rassemble tout ce petit monde dans une seule escarcelle.

Pourquoi cette réaction gênée, ces dénégations outrées ? Probablement parce que de nombreuses personnes assimilent "communauté" à "communautarisme". Or le communautarisme désigne une tendance socio politique englobant une ou des communautés, ce qui est très différent. Né aux Etats-Unis, ce terme définit en premier lieu la fonction sociale des organismes communautaires, mais cette définition varie d'un pays à l'autre. Ainsi en France le communautarisme désigne le fait de revendiquer des droits différents justifiés par l'appartenance à une communauté, qu'elle soit culturelle, ethnique ou religieuse. C'est donc un projet sociopolitique qui vise à soumettre les membres d'un groupe aux normes propres à ce groupe, et donc à encadrer les opinions, les croyances, les comportements de ceux qui sont supposés appartenir à cette communauté. Selon Gil Delannoi (1) "Si le nationalisme est une obsession de la Nation, le communautarisme est une obsession de la communauté."

Mais qu'en est-il de l'emploi récurrent de ce terme ces dernières années ? On remarquera qu'il n'est utilisé que pour désigner des minorités ethniques, religieuses ou socio culturelles, jamais par exemple pour ce milieu bourgeois, presque exclusivement blanc et masculin, qui forme le monde très fermé des décideurs économiques et politiques. Je cite ici Sylvie Tissot (2) "La communauté se voit parée de toutes les vertus quand elle est nationale, et elle appelle une allégeance, un amour, un dévouement impérieux et exclusifs, donc un "bon communautarisme". Elle devient suspecte dès qu’elle est régionale, sociale, sexuelle, religieuse, ou plus précisément dès que, sous ces différentes modalités, elle est minoritaire." Très clairement, l'emploi du terme "communautarisme" légitime un discours raciste et tendancieux. Or si ce mot rencontre des réalités sociales et sociétales avérées, il n'est pas employé dans ce sens mais dans celui de ceux qui le dénoncent comme une forfaiture envers notre modèle de société qu'il faut par tous les moyens rejeter. 

Dans leur livre "L'illusion Nationale, deux ans d'enquêtes dans les villes FN", Vincent Jarousseau et Valérie Igounet ont employé le terme "communautaire" dans leur présentation de Beaucaire : "Quelques cafés et commerces, principalement communautaires, subsistent dans les rues principales." (p. 52). Des beaucairois de tous bords ont sauté au plafond et violemment critiqué cette phrase sur les réseaux sociaux, lui attribuant d'emblée une connotation tendancieuse. Pourtant "communautaire" signifie simplement "qui relève d'une communauté" et n'a absolument rien de stigmatisant. Cet exemple démontre combien l'usage de la langue française est un exercice difficile pour certains qui se piquent de défendre les valeurs républicaines et qui, en voulant trop en faire, le font bien mal.

A tous ceux qui pointent du doigt les diverses communautés de notre pays, et elles sont légions, en les accusant de porter des revendications communautaristes et de menacer l'équilibre républicain, je rappellerai que seule une complète égalité des droits favorisera une égalité des devoirs et l'atténuation des communautarismes. Et nous en sommes très loin. Les communautés qui subissent harcèlement, violences, racisme, haine et discriminations se replient sur elles-mêmes pour se protéger de la vindicte de leurs agresseurs. C'est un réflexe naturel que l'humanité porte en elle depuis la nuit des temps. Commencez par accorder à tous le droit de vivre et d'exprimer leurs choix de vie en accord avec les lois de la République, et cessez de les désigner comme les boucs émissaires de toutes vos frustrations.

A la réplique majeure censée vous couper le sifflet et vous remettre la tête à l'endroit, que d'aucuns vous balancent de manière comminatoire et sans aucune subtilité "Il n'y a pas de communautés, il n'y a que des citoyens et des citoyennes." je répondrai oui, certes. Mais certain(e)s le sont plus que d'autres. Et tant que cela existera les communautés continueront à favoriser à ce communautarisme que tout le monde regarde, souvent à juste titre, avec défiance. 

Petite précision. Si l'on admet que le communautarisme se définit majoritairement par des valeurs de référence qui sont essentiellement traditionnelles et construites sur un passé mythique ou idéalisé, on notera que les groupes identitaires liés à l'extrême-droite sautent à pieds joints dans cette description. On peut ainsi remarquer qu'ils sont les premiers à désigner "le communautarisme" comme une menace pour la République, et que de trop nombreux politiques de droite comme de gauche leur emboîtent le pas en occultant volontairement le fait qu'ils relaient des communautaristes d'extrême-droite tout aussi menaçants. Quid de l'équité ? Encore une fois, dès lors qu'il s'agit d'une communauté blanche, chrétienne et bien propre sur elle, les plus virulents adversaires du communautarisme n'y voient que du feu, y compris lorsque la menace est au cœur de leur propre communauté. 

Notes 
1- Gil Delannoi est un  politologue et sociologue français, spécialiste du nationalisme, du libéralisme et de la pensée politique française contemporaine
2- Sylvie Tissot est une sociologue, professeure au département de sciences politiques de l’université de Vincennes-Saint Denis-Paris VIII. Elle milite pour les droits des femmes et les droits des étrangers

mercredi 18 septembre 2019

DÉLITEMENT


Nous assistons, les bras tranquillement croisés pour la plupart, au délitement de notre société moderne. Nous laissons s'installer de graves dérives idéologiques sans vraiment réagir, ou si peu. Nous encourageons l'ancrage des nationalismes et des populismes les plus crasses dans nos villes. Ils gangrènent notre pays, essaiment en Europe et se lient avec leurs homologues sur toute la surface du globe. En silence. Un silence assourdissant, pire que tous les tintamarres que nous pourrions inventer, plus dangereux que n'importe quelle révolution. Un silence qui étend sur notre société un brouillard épais, opaque, malsain, de ceux qui précèdent les grands bouleversements d'un siècle.

Et l'histoire de l'humanité est ainsi faite que chaque siècle a rassemblé les conditions de terribles périodes d'affrontements dont le seul mérite est d'avoir, à chaque fois, enfanté une société plus évoluée, plus ouverte, plus humaine. Laquelle s'empresse de régresser sur le plan des libertés à mesure qu'elle progresse sur celui des technologies. Paradoxe ? L'humain en est un à lui seul, alors l'humanité toute entière... A croire qu'il plaît à beaucoup de regarder notre monde s'écrouler, voire même de l'y aider, alors que nous disposons de toutes les clés pour lui permettre d'évoluer vers le meilleur. Notre 21ème siècle ne fera pas exception à la règle. Le pseudo patriotisme qui préside à la fermeture des frontières et aux persécutions des minorités s'assied aujourd'hui comme hier, mieux qu'hier ! autour des tables rondes de nos gouvernements avec leur bénédiction, et a désormais droit de cité dans nos institutions régionales, départementales et locales. Cette vieille lune de l'extrême-droite qui ne meure jamais, incroyablement tenace et capable d'une aberrante résilience sociale, resurgit à point nommé pour souffler les mots de nos dirigeants et inspirer les discours et la rédaction des textes officiels qui dicteront nos actes et en limiteront la portée.

A cet égard chacun a pu constater que pour sa rentrée politique, et dans l'objectif affirmé d'un ancrage territorial, la présidente du Rassemblement National a étoffé la monotonie de son discours habituel pour racoler le plus largement possible. "La mode est à la transition écologique, or nous n'avons aucun programme ni compétences dans ce domaine" s'est-elle probablement dit "nous devons parer au plus pressé et parler au cœur de tous en liant l'écologie à nos préoccupations fondatrices." Ainsi voit-on poindre le nez du "localisme" qui permet à Marine Le Pen et sa cour de légaliser en quelque sorte, et à tout le moins de justifier, l'impensable. Offrant à ses partisans peu regardants sur le sujet l'excuse parfaite qui validera la plus minable des démarches pseudo-écologiques et inscrira son parti au rang de sauveur tout à la fois de notre civilisation et de notre planète. Satisfaisant ainsi les plus radicaux de ses sympathisants et/ou adhérents et donnant aux plus jeunes l'illusion de faire quelque chose de bien pour leur avenir et celui de leurs progénitures présentes ou futures. 

La plus grosse arnaque de l'extrême-droite c'est celle-là. Car qu'est-ce que le localisme, sinon un repli sur soi prôné à tous les stades de la production et de la consommation, qui justifie aux yeux du Rassemblement National, de ses alliés et de ses satellites, de fermer les frontières et de faire peser sur l'immigration, encore et toujours tenue responsable de tous les maux, la menace d'une exclusion définitive de la société française ? Quels que puissent être la teneur de ses discours et de son programme, qu'ils s'adressent à nos villes et villages, à notre pays ou à l'Europe dans sa globalité, le Rassemblement National surjoue ses prétendus atouts et n'apporte aucune solution miracle, dans aucun domaine. Parce que jamais rien de ce qu'il propose n'est au bout du compte humainement acceptable. Pourquoi ? Parce que ce n'est en aucun cas l'humain qui intéresse ce parti, uniquement ce qu'il peut en retirer pour asseoir sa propre puissance. Et pour ce faire tous les moyens sont bons, à commencer par les plus éhontés des mensonges que Marine Le Pen et les cadres de son parti, y compris et surtout les maires de nos villes, débitent  comme de bons petits perroquets à longueur de temps et d'antenne. On ne remerciera pas certains médias de leur donner une aussi indécente visibilité, au mépris de toute solidarité avec ceux sur lesquels le Rassemblement National crache en toute occasion. Comme toute l'extrême-droite, et hélas une partie de la gauche. C'est à la mode cela aussi, comme l'écologie. Et certains chaussent avec délectation leurs bottes de sept lieues...

Malgré, ou peut-être en raison de tout cela, ce parti s'ancre durablement dans nos localités, et par là-même dans notre quotidien. Sans doute est-il possible de changer cette dynamique, en effectuant non pas un retour en arrière mais un fabuleux bond en avant ! Toutes les alliances et bonnes volontés du monde n'y suffiront probablement pas, et ce n'est certes pas avec une cuillère de miel dans une main et un bol de soupe dans l'autre qu'il sera donné de se débarrasser de ces gens-là. Pour ce faire il n'existe qu'une solution : interdire toute constitution de partis ou mouvements politiques dont l'ADN serait en contradiction flagrante et assumée avec les résolutions inscrites dans les articles 1, 2, 4, 6, et 10 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Et dissoudre ceux déjà existants, le Rassemblement National en tête. Pour les sélectionner il suffit de lire leurs statuts, c'est hautement instructif ! Notre Constitution nous en donne l'opportunité, pourquoi cela n'a-t-il jamais été fait ? Pourquoi les plus hautes instances renâclent-elles à agir lorsque d'aucuns les saisissent ? Par pur calcul électoraliste. Il est certain que pour franchir le pas il faudrait faire preuve d'un courage et d'un sens éthique que beaucoup ont perdu, s'ils les ont jamais possédés. 

Cela vous semble radical ? Cela l'est en effet. Mais le danger de voir sombrer notre société l'est plus encore, plus réel que ne le sera jamais tout argumentaire qui viserait à prouver le contraire. On ne défend pas l'indéfendable.


Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen - Préambule de la Constitution

Art.1 - Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.
Art.2 - Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression.
Art.4 - La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi.
Art.6 - La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. 
Art.7 - Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l'instant : il se rend coupable par la résistance. 
Art.10 - Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi.