samedi 1 février 2025

ON EN PARLE ?

On se demande parfois ce qui se passe dans la tête des personnes que l'on croise tous les jours. Nos amis, nos voisins, nos commercants, nos relations de bistrot...La parole s'est libérée. La parole raciste, sexiste, et discriminatoire, s'entend ! On reçoit des affirmations crues, brutes de décoffrage. Sans fondement, sans socle, sans profondeur. Balancées avec conviction, entre rire et colère. Avec frustration. Avec l'assurance de celles et ceux qui ne savent rien mais qui osent tout. C'est surprenant. Déstabilisant. Parfois on le vit comme une agression. A d'autres moments on en rigole. Et on n'écoute plus vraiment.

On a beau vivre dans une ville tombée dans l'escarcelle du RN depuis bientôt onze ans, c'est toujours la même violence qui vous saute au visage. Parce qu'il semble impensable de réellement entendre ce que l'on entend. Et dans ce partage unilatéral, dont on se passerait volontiers, une question se pose. Est-il opportun de répondre ? Ou doit-on s'abstenir ? Le peut-on ? Doit-on laisser ce type de propos se répandre et se banaliser ? La réponse est non. Définitivement non. Il ne faut jamais laisser passer des propos racistes, sexistes, discriminatoires, sans les relever. Même si l'on sait pertinemment, et c'est une conviction qui s'est construite à l'épreuve du temps, que cela ne servira pas à grand-chose. Voire même à rien ! Ces scrupules nous honorent, même s'ils nous entravent. Mais l'autre en face, qui vous crache des horreurs à la gueule comme s'il vous parlait de la météo,ne se pose aucune question. Il ou elle, a juste envie, besoin, de se répandre. De faire connaitre son ressenti. De vous faire part de ses analyses politico-économico-sociétales, bien souvent nourries au comptoir, pondues à l'aune de ses rancoeurs, de sa solitude, et de ses peurs. Et ces gens-là finissent par vous toucher. Leur mal-être vous peine... Il s'agit rarement de propos haineux. La haine ne se profile majoritairement que derrière un écran. Pas de visu. Quand on parle face à face, on finit toujours par trouver un terrain d'entente. Les vrais haineux vous pourrissent à distance. La lâcheté est le leitmotiv sur lequel s'appuient leurs idéologies malsaines. Vous les croiserez rarement dans la vraie vie. Et lorsque cela arrive, ils détalent comme des lapins.

Au comptoir, au marché, dans les commerces, c'est différent. On apprend à connaître l'autre. On sympathise. On plaisante. On finit par s'apprécier, en dépit des positions contraires des uns et des autres. Alors on répond sans s'énerver. Sans juger l'autre. On tolère ce que l'on ne saurait admettre dans le grand bain d'acide, et de bêtise crasse, des réseaux sociaux. Finalement, ces rapports improbables sont constructifs. Ils vous donnent le sentiment de vous jeter dans une mêlée de rugby, ou de surnager dans un panier de crabes aux pinces affûtées. Je ne saurais pas quoi faire d'un ballon ovale, mais heureusement pour moi, je nage très bien.