dimanche 24 novembre 2019

POROSITÉ, ALLIANCE ET COMPROMISSIONS


De la porosité à l'alliance il n'y a qu'un pas ! Certains candidats Les Républicains aux municipales le franchissent aujourd'hui allègrement, en s'appliquant à normaliser l'extrême-droite pour servir leurs ambitions politiques. Il est probable que cela leur donne bonne conscience, car à moins d'être devenus idiots ils ne peuvent nier ce que représente le Rassemblement National. Ils choisissent donc de s'allier au pire de l'échiquier politique, tirant sans états d'âmes un trait sur les combats du passé pour enrayer la menace fasciste. Et faisant corps désormais avec cette menace.

Pour conserver son ancrage local la droite en perdition se délite ouvertement, et concrétise par ses prises de position une dangereuse porosité avec l'extrême-droite, faisant siennes les idées liberticides et antirépublicaines du Rassemblement National au risque de mettre notre nation en danger. Clairement, elle entend redresser la barre en s'acoquinant publiquement avec les voyous de la République qui fondent l'extrême-droite la plus radicale. Les ambitions municipales des uns serviront les intérêts territoriaux des autres, jusqu'à ce que l'on ne sache plus très bien qui est qui tant leur gémellité idéologique s'affirmera jour après jour. 

Car s'il est un constat que l'on peut faire, et qui est à la portée de tous ceux qui s'engagent dans la bataille des municipales, c'est qu'il n'y a plus guère de différences entre Les Républicains et le Rassemblement National. Il suffit de mettre certains sujets polémiques sur le tapis pour que les propos dérapent et que s'affichent franchement racisme ordinaire et volonté de mettre bas la laïcité au nom d'un roman national chrétien fantasmé. Et si vous fermez les yeux vous ne saurez plus qui s'est exprimé le plus odieusement des uns ou des autres... Incroyable ? Pas tant que cela. Les militants antiracistes dénoncent cette porosité depuis plusieurs années, cette alliance affichée n'est donc qu'une demi surprise. Si elle provoque un sursaut de dégoût et déçoit, elle était néanmoins attendue d'une échéance électorale à l'autre. 

On ne peut bien entendu faire de bilan sur la droite sans en faire de même pour la gauche. Mais quelle gauche ? Elle est tellement désunie et affairée à sauver les meubles qu'une partie de ses éléments ont foncé tête baissée dans le piège du populisme, de bonne foi et sans vouloir admettre les dérives qu'ils cautionnaient par leur engagement. L'espace politique et sociétal se retrouve ainsi encombré de personnes qui ont porté, et portent encore, des avancées sociales et républicaines au nom de l'égalité des droits, mais qui désormais hurlent avec les loups de cette extrême-droite honnie, aveuglés par la même haine du système et résolument accrochées aux œillères généreusement fournies par leurs leaders et autres maîtres à penser. Là aussi, tout comme à l'extrême-droite, la liberté d'expression n'est qu'illusion démagogique que l'on vous sert en hors d'oeuvre pour mieux vous faire avaler le plat de résistance qui n'était pas inscrit au menu lorsque vous vous êtes assis à la table. La tentation est si grande d'oppresser, de diriger, de trancher des têtes, de se noyer avec les autres en se persuadant que l'on ne risque rien... Trop peu nombreux sont ceux qui refusent de plonger et défendent farouchement leur libre arbitre quand tant d'autres prétendent garder le leur, convaincus par leurs propres mensonges. 

On remarquera d'ailleurs qu'à droite comme à gauche les mêmes arguments et les mêmes ressorts sont brandis pour vous faire taire si vous osez affirmer qu'ils sont dans l'erreur ou pointer du doigt leurs dérives. Coïncidence ? Non. Il n'y a pas de hasard. Quand vous allez trop loin, d'un côté comme de l'autre, vous dérapez forcément un jour ou l'autre, c'est inéluctable et l'histoire l'a maintes fois prouvé. Les meilleures intentions du monde ont accouché des pires dictatures, et selon que vous vous trouviez d'un côté ou de l'autre de la barrière, vous serez agresseur ou victime. Mais foin d'illusions ! Les agresseurs demeureront toujours ce qu'ils sont, et vous asseoir à leur table n'en fera pas moins de vous des victimes.

Quid de nos jolies villes de province dans cette configuration cauchemardesque ? Malgré les sursauts républicains des uns et des autres l'extrême-droite renforce son ancrage local, elle se donne les moyens de ses ambitions et continue d'avancer, inexorablement. Ne pensez pas que ce qui se passe ailleurs n'aura pas de répercussions dans nos villes. Dès lors que l'on normalise ce qui ne devrait jamais l'être, on ouvre la porte à toutes les compromissions. Comme en amour, le plus douloureux c'est la première fois, après çà passe tout seul et l'on atteint la jouissance... Les Républicains ont ouvert la voie, certes, mais nul doute que nous verrons d'autres partis ou mouvements pactiser avec le diable pour s'accrocher au pouvoir ou le reconquérir. Les compromissions des uns et des autres donnent déjà de sérieux coups de canif dans le contrat républicain ici ou là, et les municipales s'annoncent compliquées pour les électeurs qui ne sauront plus très bien pour qui voter. Quand vous défigurez le paysage politique c'est un risque à prendre.

Alors d'aucuns vous diront que ce n'est pas si grave, qu'il vaut mieux cela que des affrontements qu'ils considèrent comme une perte de temps (ils entendent par là une perte de voix) qu'au nom de la démocratie on doit laisser toute sa place au Rassemblement National et consorts. Je leur répondrais qu'au nom de la démocratie justement, on ne peut pas, on ne doit pas, accorder un droit d'existence et de parole à des partis notoirement antirépublicains. Quels qu'ils soient, et quelle que soit leur tendance politique. En France notre vieux système c'est un peu les écuries d'Augias, la bouse s'est étendue dans les moindres recoins du territoire, et pour le nettoyer il faudrait qu'y débordent tous nos grands fleuves. En priant pour que tous les antirépublicains soient ainsi emportés par les eaux. Les survivants, s'il y en a, pourraient ainsi redémarrer en partant de zéro et en portant la République à bout de bras. Pour l'heure c'est tout le contraire. Certains partis politiques ne se conduisent pas mieux que des proxénètes, la République est pour eux une pute de luxe sur le labeur de laquelle ils enrichissent leurs magots. Quand elle sera usée par les scandales, les compromissions, les détournements d'argent, les atteintes à la laïcité et les attentats perpétrés par ses propres enfants, ils la jetteront et en adouberont une autre, plus jeune et plus résistante. Avec laquelle ils pourront cette fois faire bombance sans craindre d'être remisés au placard.

Voilà très exactement où nous en sommes. Vous je ne sais pas, mais moi cela me donne la nausée.


Note
Cette configuration ne concerne pas Beaucaire

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