mercredi 28 octobre 2020

TU PARLES ! TU PARLES...


Alors on danse ? Ah non c'est vrai, on parle ! Enfin, tu parles. T'es suspendu aux lèvres de ceux qui parlent, tu parles de ce qu'ils vont dire avant qu'ils ne l'aient dit, tu parles de ce qu'ils ont dit et que tu n'as ni vraiment écouté ni compris. Quand ils parlent tu râlent, et quand ils ne parlent pas tu râles aussi. En fait tu râles tout le temps. Contre tout, contre tout le monde, contre ce qui s'est passé, contre ce qui se passe et contre ce qui se passera peut-être et dont tu ne sais rien. Toi tu parles ! Tu parles de tout et de n'importe quoi, surtout de ce que tu ne connais pas. Pas grave, l'essentiel c'est de parler. C'est de ramener ta fraise au comptoir ou en terrasse, au distributeur de café ou la cantine de ta boîte, devant l'école de tes gosses, et même tout seul... Parce que si tu parles, forcément on t'écoute. Donc tu existes. Et pour exister tu ferais n'importe quoi ! Comme dénigrer systématiquement ceux qui parlent et qui possèdent leur sujet, pas comme toi hein ? Mais tu t'en fous ! Toi tu veux juste parler, donner ton avis même si personne ne te le demande, même si personne ne s'intéresse à ce que tu penses, même si personne n'a envie de connaître tes positions. Ne rougis pas, on ne parle pas de positions sexuelles hein ? T'as vraiment l'esprit mal tourné... Quoi ? Tourné où ? Heu... Bon j'vais raccrocher moi, c'était déjà difficile de te faire comprendre des trucs simples, mais si en plus tu manques d'humour autant que de culture, on n'est pas sortis de l'auberge ! Quelle auberge ? Mais on s'en fout ! On veut juste que tu la fermes. Pourquoi ? Attends, laisse-moi réfléchir une seconde... Parce que tu dis des conneries, par exemple ? Ou parce que tu régurgites le pire de tout ce que tu peux lire ou entendre sur internet ou à la télévision ? Ou tout simplement parce que tu nous emmerdes. J'suis pas polie moi ? J'tai pas traité de connard pas vrai ? Pourtant je le pense si fortement que tout le monde doit m'entendre. Hein ? Tu t'en tapes de ce que je pense ? Ben çà tombe bien, moi aussi. Allez ! Sans rancune, on reparlera de tout çà quand les bars rouvriront. Sauf si tu n'es plus là pour en parler.

mardi 20 octobre 2020

Il est content Julien !


Il est content Julien ! Il est content ! On lui a servi une occasion en or de s'égosiller dans tous les médias sur le mode "il faut en finir avec le terrorisme islamiste !" et il s'est attelé à la tâche avec une remarquable conscience professionnelle. Il hurle au loup et on l'applaudit, il désigne la Bête à abattre et la nomme "les immigrés" ou "les musulmans" selon le cours du débat. Il prône des mesures rigoureuses et une justice implacable, entendez par là "les" mettre tous dans un bateau et les renvoyer "chez eux". Mais il perd la boule Julien, il oublie que chez eux c'est ici ! Où va-t-il les renvoyer ? Dans quelle province ? Déjà qu'il crie au scandale quand les migrants débarquent, on n'ose croire qu'il ose ajouter des français musulmans pour grossir les lots répartis dans nos provinces... Faudra qu'il trouve vite une solution, parce qu'en attendant il a déchaînée la meute des Onéchénou, toujours dans les startings blocks ! Vont pas être contents les franchouillards... Sinon, on lui fera remarquer que pour le sacrifice de l'Aïd 'il a deux mois de retard et qu'il devrait mettre son planning à jour. Mais bon ce n'est pas de sa faute si ce pauvre professeur a été décapité seulement maintenant, hein ? Cà ne se trouve pas sous les pieds d'un cheval une bonne victime, il le sait pourtant... C'est vrai que le brave garçon court après les victimes du terrorisme comme un artiste désargenté après le cachet, et c'est un exercice bien difficile pour lui qui n'a rien d'un sportif.

Bon d'accord, il n'a pas vraiment le choix ! Quand on fait commerce de la haine on ne se montre pas regardant sur les circonstances, on prend le tout venant et on s'engouffre dans la spirale médiatique en enfonçant moult portes ouvertes. Il s'y connait bien en portes ouvertes Julien, c'est son truc favori, il excelle à s'y jeter de tout son poids, avec la conscience tranquille du devoir accompli. Il faut dire que le gars qui a assassiné le professeur lui a servi sa tête sur un plateau, un peu comme celle de Jean-Baptiste, souvenez-vous de vos cours de catéchisme... Et il n'a même pas eu à jouer les Salomé et à faire la danse des sept voiles, c'est-y pas mignon çà ?! Gratos, tout chaud, prêt à servir ! 

D'ailleurs il s'y collera pas plus tard que demain dans notre bonne vieille mairie. Sa voix, à n'en pas douter, résonnera dans le silence funèbre qui planera sur l'assistance, il se livrera pour la circonstance au difficile exercice du "je mets mon masque, j'enlève mon masque, je cause, je prends l'air attristé, je souris à mes fans, et hop ! je remets mon masque" Emballé c'est pesé ! On livre ! On livre quoi ? Ben le discours idoine tiens ! Pas besoin de l'écouter, on sait d'avance ce qu'il contiendra... A moins qu'il ne décide pour une fois de faire dans la sobriété, mais au vu de l'ennemi qu'il lui faut désigner de sa vindicte ce serait pour le moins surprenant.

Bref ! En ces temps troublés qui diffusent tristesse, peur et colère parmi la population, lui se régale en allumant l'une après l'autre les mèches de haine qui feront exploser le schmilblick. Un reste d'enfance peut-être ? On sait que les garçons adorent jouer à la guerre, foutre la merde c'est leur occupation favorite. Et faudrait pas croire qu'ils s'améliorent en grandissant hein ? Il n'est hélas pas seul de son espèce Julien, il y en a des tas comme lui, prêts à alimenter le chaudron dans lequel ils entendent bien faire mijoter à petit feu la pauvre Marianne ! Avec tous les terroristes bien sûr ! Mais pas les blancs hein ? Non, les blancs on les garde au chaud, ils peuvent servir... Puis ce sont ses potes à Julien, on ne met pas ses potes dans un bateau, sauf pour leur offrir une croisière. Non, ces potes-là on les fait bosser à la mairie et on fait mine d'ignorer qu'ils sont fichés S eux aussi. Sans blagues ? Ben oui, sans blagues. Parce que même s'il est content Julien, il ne rigole pas tous les jours. Il a mieux à faire vous comprenez, il a un discours à prononcer.

mardi 6 octobre 2020

Pleure pas Julien !


Gnagnagna... Bouhouhou... Sniff ! Oh la la la ! Pour un peu il me ferait de la peine... Tiens Julien, prends un mouchoir ! Prends même toute la boite, t'as pas fini de pleurnicher... Pauvre garçon qui se sent attaqué dans son identité, remis en question dans son essence même, appauvri par l'invasion programmée d'un monde fantasmé qu'il imagine terrifiant et qu'il rejette en bloc sans rien en connaître. Fort de son bon droit et de l'appui inconditionnel d'une certaine clique, il s'est lancé courageusement dans l'arène pour un mano à mano avec le Président himself, si señor ! Nous offrant ainsi l'un de ces communiqués coup de poing dont il a le secret et qui font instantanément le buzz sur les réseaux sociaux. Ne vous y trompez pas, hein ? Au fond il est content Julien ! Entre deux larmes de crocodile il a déversé un racisme bien propre, débarrassé de toutes les conventions qui l'entravent d'ordinaire dans son quotidien de maire, il a donné le meilleur de lui-même et attend tranquillement les félicitations de son parti politique. En serrant des paluches à la mode Chirac, et même des paluches arabes dis donc ! C'est dingue, non ? Il a peur de la langue, mais les gens ma foi ils pourraient voter pour lui sur un malentendu à force de le voir faire son mielleux aux terrasses des cafés. Alors d'un côté il crache sur leur culture et leur civilisation, de l'autre il comptabilise ce qu'ils peuvent lui rapporter. Un comportement qui sent son nostalgique du colonialisme à plein nez... 

Notre bon maire est pétri de contradictions plus encore que de convictions. Pour ses congénères et lui le schéma est très clair : on ne les aime pas les arabes, mais vivre sur leur dos çà c'est tout à fait possible. On hurle au loup si leur alphabet franchi la porte de nos écoles, on dénigre leur culture à tour de bras, mais on part en vacances à Djerba ou en retraite au Maroc. On s'évanouit d'angoisse en voyant un foulard mais on se régale d'un couscous sans se soucier de savoir si celle qui l'a cuisiné est voilée. Selon l'adage "ce qu'on ne voit pas ne nous tue pas !" on avance avec des œillères et surtout, surtout, on se refuse à étendre ses connaissances en apprenant une langue portée par une des plus belles et plus riches civilisations du monde.

Pleure pas Julien ! T'as pas fini d'entendre parler arabe au coin des rues de Beaucaire, de Paris et d'ailleurs, va falloir t'y faire hein ? Bon t'es trop vieux pour retourner à l'école, dommage. On aurait bien aimé que l'arabe devienne obligatoire pour que tu puisses l'apprendre enfin, mais du coup je t'ai concocté un bon p'tit cursus à domicile... Les cours débutent lundi prochain, j'te ferai livrer à la mairie quelques boites de mouchoir, de l'encre et des plumes pour la calligraphie arabe. Ta prof porte le foulard mais elle est sympa, tu verras çà se passera bien. Cela ira ? Allez, courage  #fuerza