mardi 26 mai 2020

CARNAVAL MUNICIPAL


Se taper l'installation du nouveau conseil municipal en live pendant quatre heures c'est extrêmement indigeste ! On ne bénéficie ni des ressentis ni des échanges, pas d'apartés, pas de moments de relaxation, rien... Cela dit un carnaval reste un carnaval, quel que soit le moyen auquel on y assiste. On ne peut pas dire que je l'attendais avec impatience, mais au moins le mal est fait. La majorité municipale a épousseté ses fauteuils, certains pour s'y rasseoir et d'autres pour s'y arrimer en se rendant compte de ce qui les attendait. Car c'est une chose de se présenter sur une liste, c'en est une autre de savoir exactement quelles contraintes pèseront sur ceux qui s'engagent dans cette voie sans s'être méticuleusement renseignés avant de signer ! Et la ligne de conduite de la gestion municipale est clairement posée : elle sera identitaire ou ne sera pas. Oh le maire a l'intention de jeter quelques os à ronger pour faire passer le plus gros de l'artillerie, mais il n'aura abusé personne. Rien ne changera dans ce conseil municipal. Pas de liberté d'expression, pas de travail main dans la main avec les oppositions, pas de souplesse, il ne cédera pas d'un iota sur la plus petite de ses décisions. Bien naïf serait celui qui se persuaderait du contraire.

Il est certain que je ne vais pas me farcir les conseils municipaux des six années à venir comme je l'ai fait ces six dernières années. C'est long, c'est fastidieux, et cela me met les nerfs en pelote ! Mais lorsqu'il sera permis aux beaucairois d'y assister, je ne saurais trop leur conseiller de faire cet effort afin de bien cerner ce qui se passe dans leur ville. On n'en sait vraiment rien tant que l'on n'a pas mis le nez dedans. Les ardents défenseurs de Julien Sanchez qui rêvent de reconduire aux portes de Beaucaire tous les opposants, et tous ceux qui osent seulement s'interroger sur le bien fondé de certaines décisions, feraient bien de s'y astreindre. Cela leur permettrait au moins de savoir de quoi ils parlent à défaut de les faire évoluer vers une critique constructive. Car oui, ne leur en déplaise, il est sain de s'intéresser, de questionner, de proposer, voire même de réfuter ou rejeter ce qui nous semble aller à contrario des intérêts de notre ville. Et donc des nôtres. Cela s'appelle la démocratie.

Julien Sanchez a d'ailleurs posé le décor pour les six années à venir en malmenant l'opposition comme à son habitude, avec des remarques teintées de mépris, aussi déplacées que sans subtilité, et une pointe de hargne à peine déguisée, sous les acclamations virtuelles de quelques fans extasiés. Et cela franchement je ne le regretterai pas. Les moqueries, les insultes, les attaques ad hominem, les longs discours de politique nationale, les pleurnicheries de la victime qu'il surjoue en permanence, l'irrespect avec lequel il traite les conseillers d'opposition et les opposants citoyens, sa prétention à se poser en défenseur d'une liberté d'expression à sens unique, ses coups de colère... Non, vraiment, on n'assiste pas au conseil municipal de sa ville pour voir çà ! Mais c'est pourtant à cela que nous avons droit plusieurs fois par an pendant un minimum de trois heures. Savoir qu'il en va de même dans toutes les villes gérées par l'extrême-droite ne m'est en aucun cas une consolation.

En attendant chers amis vous en avez repris pour six ans, douze ans, pourquoi pas vingt quatre ans comme certains mandats passés ?! Le propre des beaucairois, l'histoire l'a prouvé, étant de râler mais de revoter encore et encore pour le même, parce que finalement ce n'est pas si mal et qu'il y a toujours pire ailleurs... Ne vous illusionnez pas, c'est ce qui vous attend. Qui nous attend. Et cela me rend malade de vivre dans une ville qui a fait sciemment le choix de l'extrême-droite et de son cortège de fake news, de baratin, de mensonges et de gestion discriminatoire. La logique voudrait que chacun voit midi à sa porte et s'évertue à protéger ses biens, à nourrir ses espérances et à préserver son avenir. Celles et ceux qui ont voté pour la liste Rassemblement National font tout le contraire. Sciemment pour la plupart. Il y a pourtant fort à parier que la nouvelle majorité municipale effectuera comme la précédente le grand écart entre ses promesses de campagne et l'implacable réalité des faits et des chiffres. Avec brio et fatuité.

Pour moi la fête est finie, je ne veux plus assister à ce carnaval. Je vais faire une pause. J'estime avoir dépensé suffisamment d'énergie et de temps pour informer les beaucairois, la plupart du temps en pure perte, pour pouvoir me permettre de souffler un peu. Il est temps de penser un peu plus à moi, à mes projets délaissés pour m'investir sans compter dans ce combat. Je n'en oublie pour autant les autres, je serai là pour les beaucairois qui auront besoin de mon aide et de mon soutien. Je tourne la page, et je laisse aux oppositions municipales le soin de faire le job. Ou du moins la partie qui les concerne directement. Je n'assisterai plus aux conseils municipaux que de temps à autre si les délibérations à l'ordre du jour rejoignent mon combat pour l'égalité et contre le racisme. Il appartient aux beaucairois de mener leur propre combat et de se mobiliser pour revenir aux valeurs républicaines qui ont déserté notre ville. Ou pas. Car après tout on a le maire qu'on mérite. 



vendredi 15 mai 2020

UNE ARMÉE ? QUELLE ARMÉE ?


Relire hier après-midi L’Armée Des Ombres, de Joseph Kessel, et chercher en vain ce formidable héroïsme dans le monde d’aujourd’hui... Les acteurs de la Résistance contre la peste brune, dont je suis un infime rouage, luttent chaque jour pied à pied pour transmettre et faire perdurer la flamme. Relire cette œuvre magnifique me fait prendre conscience des différences majeures entre ces années de guerre et notre société actuelle, égocentrique, veule, lâche et pétrie de peurs absurdes. Nous nous retrouvons pourtant dans un climat similaire, mais il n’y a plus guère d’hommes et de femmes courageux, prêts à se sacrifier pour garantir un monde juste. Il n’y a plus de grandeur en France, il n’y a que des opportunismes et des compromissions. 

Est-ce sur des valeurs faussées et une vision déformée par le complotisme, la haine et l’envie que se fondera le monde de demain ? Ce n’est tout simplement pas envisageable. Il n’y a qu’une notion qui vaille la peine que nous luttions encore et toujours, celle d’égalité. Parce que l’autre est une part de nous-mêmes, et ce n’est qu’ensemble que nous bâtirons un monde réellement et profondément meilleur. 

A tous ceux qui entendent se montrer consensuels avec l’extrême-droite et qui s’emploient à minimiser les propos et actes racistes, antisémites et discriminatoires de ses séides, il faut sans cesse rappeler qu’on ne discute pas avec cette nébuleuse, on la combat. Sans relâche, sans faiblir, et surtout sans illusions. La bête hideuse et protéiforme existe depuis que le monde est monde, projetant sur l’autre, l’étranger, celui qui ne lui ressemble pas, ses peurs fantasmées et ses frustrations. Pendant que notre société évolue la bête s’adapte et se fond dans le décor avant de revenir en force et de s’engouffrer dans nos failles. Notre système en a tant désormais qu’il nous met en danger permanent d’être asservis. La bête a introduit ses rejetons dans les arcanes du système pour le gangréner, elle se pavane sur les plateaux de télévision et donne des conférences, avec le même orgueil, la même suffisance que ceux qui prétendent la combattre et s’empressent à préparer sa couche comme de bons courtisans. 

Il est de bon ton dans notre société de se prostituer pour grappiller des miettes de célébrité et grimper les échelons. La délation a force de loi, le lynchage virtuel est un passe-temps prisé, l’incompétence énoncée d’un ton docte devient parole d’évangile. Quid de la véracité des faits bruts et des paroles idoines ? Qu’en est-il du courage, de la franchise, du respect et du simple bon sens ? Si vous voulez vous perdre dans les méandres de l’information, allumez la télévision. Gobez les discours indigestes des polémistes en vogue, les analyses politiques et sociétales faussées de spécialistes qui n’en sont pas, la diarrhée verbale d’animateurs qui recrachent leur propre merde, les dérives intellectuelles de philosophes en perdition qui hissent le drapeau tricolore pour exister... 

Pauvre France ! Qu’est-il devenu ton merveilleux peuple jadis capable de tant de bravoure ? Quand l’extrême-droite nauséabonde ose prononcer le mot Résistance dont tu fus a raison si fière, qui se dresse devant elle pour lui faire rendre gorge ? Nous sommes si peu nombreux pour ce travail de titan ! Je veux croire qu’à l’image de celles et ceux qui nous ont montré l’exemple nous saurons nous aussi tisser la toile d’une armée de l’ombre insubmersible qui agira lorsque le temps sera venu. En attendant je ferai rouler ma petite pierre sur le bon chemin, avec chaque jour le souvenir de ces heures glorieuses gravées dans mon cœur et dans ma mémoire.